La France se donne t elle les moyens de tenir son rang diplomatique?

Le 21 mai, Jean-Noël Barrot, Ministre de l’Europe et des Affaires étrangères, Laurent Saint Martin, Ministre délégué au commerce extérieur et aux Français de l’étranger, Thani Mohamed Soilihi, Ministre délégué chargé de la Francophonie et des Partenariats internationaux de France et Benjamin Haddad, ministre délégué chargé de l’Europe étaient auditionnés par la commission des finances dans le cadre de l’évaluation des politiques publiques relatives à l’exécution budgétaire des missions Action extérieure de l’État. Ne pouvant assister à cette audition, j’ai confié mon intervention à mon collègue Pouria Amirshahi, que je remercie pour sa disponibilité. 

Cette journée d’audition a permis de revenir sur l’exécution du budget 2024 et de discuter de la pertinence des orientations actuelles du ministère de l’Europe et des Affaires étrangères en ce qui concerne ses effectifs, ses crédits ainsi que de l’Aide Publique au Développement. Nous avons largement abordé les questions des services publics des Français de l’étranger mais pas seulement.

Dans un monde moins sûr, dans lequel émergent de nouvelles menaces pour la France et l’Europe du fait du retrait américain et de l’expansionnisme impérial russe, il s’agit en partie de comprendre si la France compte donner à son outil diplomatique les moyens dont il a besoin. 

Dans mon intervention, je déplore que le réarmement complet de notre diplomatie promis par le Président de la République à l’issue des États généraux du quai d’Orsay en mars 2023 n’ait été qu’un vœu pieux. A l’évidence la contrainte budgétaire domine les orientations du gouvernement.


▪️174 millions d’euros de crédits ont été annulés par décret en 2024. Un effort considérable alors que la mission Action extérieure de l’État représente à peine 0,6 % du budget général de l’État,
▪️ l’exécution des crédits en 2024 était inférieure de plus de 6 % par rapport à la loi de finances initiale,
▪️ le projet de loi de finances 2025 prévoit une baisse de 200 millions d’euros sur l’AEE par rapport à la loi de finances précédente.

Dans ce contexte, j’interpelle Laurent Saint-Martin sur la baisse des budgets globaux dédiés au ministère des Affaires étrangères et les surgels de crédits, avant de revenir sur chaque programme en particulier. Je relève notamment la baisse de 7% des exécutions de crédits du programme 105 « Action de la France en Europe et dans le monde ». Une contrainte atténuée en partie par la baisse de nos contributions internationales à des missions telles que la MINUSMA au Mali et la MONUSCO en République démocratique du Congo.
En matière de diplomatie culturelle et d’influence (programme 185), je l’interroge sur les capacités d’investissement des établissements en gestion directe, notamment sur leur accès à l’emprunt qui est en partie lié à la question du niveau des frais de scolarité.

Le budget consacré aux Français de l’étranger est celui qui a le plus souffert

Après plusieurs décennies d’attrition de ses moyens, le budget du programme 151, consacré aux Français à l’étranger et aux affaires consulaires, est encore celui qui a le plus souffert en proportion (- 28M €). Je souligne notamment la baisse des dépenses dédiées aux aides à la scolarité (- 10%) et aux aides sociales (- 8%) à destination des plus vulnérables, notamment les personnes âgées. 

Les réponses du ministre délégué en charge des Français de l’étranger Laurent Saint-Martin

En préambule à ses réponses, le ministre salue la qualité du travail de la commission des finances et particulièrement celui du rapporteur spécial. Il souligne que le constat sur la baisse des budgets de l’Action extérieure de l’État est globalement partagé. Le débat tendra ainsi à devenir progressivement plus politique, notamment sur la question de la répartition des responsabilités entre le Gouvernement et le Parlement dans les ajustements budgétaires opérés. Ci-après le déroulé en 4 vidéos.

Sur le budget global et les surgels de crédits, le ministre concède que la mission AEE a été « mise à contribution » pour redresser les comptes publics, ce qui a nécessité d’établir des priorités. Mon rapport démontre que le périmètre du ministère de l’Europe et des Affaires étrangères (hors Aide Publique au Développement) a subi au total 1,7% des coupes budgétaires sur le budget de l’État alors qu’il représente 0,6% des dépenses de l’Etat. Il est donc possible de considérer que le ministère a eu à connaitre des réductions de crédits plus fortes que la moyenne de celles des autres secteurs.

Sur la baisse de 11% budget 2025 dédié à l’Action de la France en Europe et dans le monde (Programme 105), le ministre rejette la responsabilité sur les arbitrages budgétaires de la Commission mixte paritaire (CMP) « où ne siège pas le gouvernement». 

Une réponse aussi pratique qu’audacieuse, la CMP étant majoritairement composée d’alliés de la majorité, comme l’a souligné à juste titre Pouria Amirshahi.

Bourses, capacités d’emprunt des EGD et frais de scolarité : un constat d’inquiétude enfin partagé

Depuis trois années j’alerte sur la baisse des enveloppes de bourses et la hausse des frais de scolarité qui prennent en étau un nombre croissant de familles qui ont scolarisé leurs enfants dans un établissement de l’enseignement français à l’étranger. Cette année, je note que le ministre délégué mentionne la question et constate que la baisse du nombre de familles boursières posent des questions auxquelles les fonctionnaires de l’administration consulaire et les cadres de l’AEFE n’ont pas encore de réponses. Il est nécessaire notamment de se pencher sur les raisons des baisses observées et sur le profil des familles qui choisissent de sortir du réseau.

Sur les capacités d’investissement des établissements en gestion directe du réseau AEFE, Laurent Saint-Martin indique y travailler avec les services du ministère et la ministre des comptes publics, Amélie de Montchalin.

Sur les aides à la scolarité, il explique la réduction de l’enveloppe cette année en raison d’une sous exécution de leur budget dédié l’an dernier. Il s’interroge sur les raisons de cette sous exécution. 

Aide au développement : la France fait-elle du « trumpisme sans Trump » en sacrifiant son aide au développement ?

Enfin, mon intervention rappelle la coupe brutale de 35% du budget de l’aide publique au développement (APD). J’ai souligné au ministre Thani Mohamed Soilihi que cet arbitrage budgétaire imposé par 49.3 était un cadeau à l’extrême droite et à ses obsessions hostiles à la solidarité internationale.

Le ministre indique être d’accord sur le fond et souhaite un budget à la hauteur des ambitions de la France.  

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